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Le secteur du développement économique se construit une identité

Connaître les professionnels du développement économique ; structurer la profession en vue de la création d’une convention collective. Tels sont les objectifs visés par la fédération des agences de développement économique (CNER) à travers deux études présentées le 25 novembre en clôture du forum DEV&CO21 des professionnels de l’attractivité et du développement économique, qui s’est tenu du 23 au 25 novembre 2021. « Il existe 8 000 à 10 000 professionnels du développement économique, aucune étude ne leur a été consacrée, explique Antoine Angeard, délégué général du CNER. Nous souhaitons mieux les connaître et structurer une communauté de personnes parfois isolées et qui n’ont pas forcément conscience qu’elles exercent un métier ».

Un portrait-type du développeur économique

Pour la première étude, le CNER a interrogé 372 de ces professionnels entre fin septembre et début novembre afin de savoir qui ils sont, pour qui ils travaillent, leur poste... Le portrait-type du développeur économique est une femme de 42 ans, titulaire d’un bac + 5 en économie et gestion, avec 12 ans d’ancienneté dans la profession, travaillant en CDI de droit public en tant que chargée de mission ou cheffe de projet dans un établissement public de coopération intercommunale (EPCI), au sein d’une petite équipe dédiée au développement économique.

Selon les résultants de l’étude, les développeurs économiques sont en effet à 54% des femmes ; leur âge moyen est de 42 ans ; 83% sont titulaires d’un bac+5 ; 73% ont fait des études en droit, économie et gestion. L’immense majorité (plus de 9 sur 10) a travaillé en entreprise avant d’en venir au développement économique, un secteur qu’ils ont rejoint en moyenne depuis 12 ans. Nous sommes « loin du cliché d’un homme âgé qui n’exerce pas un vrai métier », remarque Antoine Angeard.

La majorité (53%) des répondants sont employés par une collectivité locale ou un groupement de collectivités. Ce qui est logique car « ces structures sont les plus nombreuses », analyse Clémence Binet, responsable des études au CNER. Ils travaillent également dans des agences de développement économique (35%) et, dans une moindre mesure, dans des cabinets de conseil (4,3%) ou dans des chambres consulaires (2,1%), essentiellement sur des missions d’aide à l’implantation d’industries ou d’activités tertiaires. L’intitulé de leur poste est en général (41%) « chargé » d’étude, de mission ou de projet.

Des offres d’emploi extrêmement variées

Le secteur du développement économique se construit une identité

Mais les libellés des offres d’emploi à destination de ces professionnelles peuvent être extrêmement variés, comme le montre la deuxième étude du CNER. Réalisée par la société d’intérim et de conseils en ressources humaines Randstad, elle porte sur le contenu de centaines d’offres d’emploi dans le domaine du développement économique parues entre janvier 2020 et juillet 2021. Leur analyse permet de « comprendre le comportement d’un marché de l’emploi et de l’objectiver », explique Aline Crépin, directrice innovation sociale et affaires publiques de Randstad France.

Pour Antoine Angeard, l’intérêt de cette étude est aussi de fournir à sa fédération un état des lieux des profils recherchés afin d’aller à terme vers davantage de « normalisation, de cohérence, de fluidification du marché du travail et de sécurisation des parcours professionnels ». Une pierre dans un chantier de long terme visant à structurer une branche et à la doter d’une convention collective (lire encadré).

Il y a un peu de travail en vue, car pour l’heure les 2 892 offres d’emploi étudiées par Randstad font apparaître la grande hétérogénéité de leur rédaction : 989 libellés distincts. « Cette diversité des appellations génère une certaine opacité », relève Patrick Vanoli, responsable de Randstad SmartData. Aussi recommande-t-il « une réflexion pour réduire le nombre trop important d’appellations métier ».

L’étude fait apparaître d’autres éléments intéressants sur le marché de l’emploi du développement économique. Le volume d’offres publiées a ainsi connu un pic en janvier 2021 lié sans doute au programme gouvernemental « Petites villes de demain » lancé fin 2020, qui a généré un important besoin de compétences. Les employeurs qui font paraître ces offres d’emploi sont, sans surprise et majoritairement (69%), des administrations publiques, principalement des communautés de communes (46%). Mais les annonceurs sont aussi (27%) des chambres de métiers, des associations (Boutique de gestion des entreprises, Dev’Up centre Loire, Initiative...) et des chambres de commerce et d’industrie. Si les contrats proposés sont majoritairement des CDI (52%) et des CDD (31%), 12% sont des contrats de projet, reflet des projets à durée de financement limitée des communautés de communes. Enfin, l’analyse du contenu des offres d’emploi a permis de construire le début d’un profil type en termes de savoirs (maîtrise de l’outil informatique, connaissance de la réglementation des marchés publics) et de savoir-être (autonomie, adaptation, discrétion, force de proposition...).

Une convention collective en 2023 ou 2024

La volonté du CNER de se doter d’une convention collective s’explique par celle des pouvoirs publiques de couvrir tous les salariés par un socle de droits sociaux (la convention collective). Actuellement, les salariés des entreprises du CNER ne disposent pas d’un tel socle. A terme, le ministère du Travail pourrait donc décider de les faire entrer d’office dans une convention collective existante et relativement proche de leur métier. Mais au risque de « perdre la maîtrise de notre destin social », explique Antoine Angeard, délégué général du CNER.

L’idée est donc de créer une « convention collective nationale des acteurs du développement et de l’ingénierie territoriale d’intérêt général » (ADITIG). Celle-ci regrouperait, outre les salariés des membres du CNER, ceux de la Fédération nationale des conseils d’architecture, d’urbanisme et de l’environnement (FNCAUE), de la Fédération nationale des agences d’urbanisme (FNAU), de l’agence nationale pour l’information sur le logement (ANIL) et de la Fédération des agences locales de maîtrise de l’énergie et du climat (Flame). Soit environ 8 000 salariés, selon Antoine Angeard. Ce qui mettrait ses adhérents à l’abri d’une fusion d’office avec une convention collective plus grande, les pouvoirs publics ayant décidé, depuis la loi du 8 août 2016 sur la modernisation du dialogue social, de fusionner celles qui couvrent moins de 5 000 salariés. « Notre convention collective devrait exister d’ici 2023 ou 2024 », déclare Antoine Angeard.

Thèmes abordés

Développement économique